Coup de coeur au Maroc
Le Maroc, c’est l’Afrique, oui, mais pas vraiment. L’Afrique du nord ne se compare en rien avec l’Afrique subsaharienne. Sa culture est largement plus occidentalisée que le reste du continent, ce qui la rend plus accessible aux voyageurs d’expérience intermédiaire et même moindre. Si vous avez vu passer sur les réseaux sociaux l’article d’une mère de famille indignée de son voyage au Maroc, vous obtiendrez ici un avis bien différent du sien. En effet, je ne peux nier l’insistance des marchands des souks de toutes les grandes villes, ou encore l’acharnement des hommes envers les femmes, mais je ne le répéterai jamais assez: Si l’on n’est pas prêt à se mettre dans la peau des gens et de la culture que l’on visite, vaut mieux rester chez soi, car on sera toujours déçus, ou challengés par rapport à nos repères, à notre confort, nos habitudes, nos valeurs… Et vous savez quoi? C’est ce qu’il y a de plus merveilleux à propos du voyage. Je vous invite donc au coeur même de vos insécurités, sur mon continent préféré, dans un pays aux paysages à couper le souffle, à la culture riche en histoire, où les couleurs n’ont d’égal que les saveurs, les odeurs et les mélodies du quotidien.
Lorsqu’on me demande quelle fut ma destination favorite, parmi tous mes voyages, il m’est absolument impossible de répondre, car chaque endroit m’a procuré une émotion unique. J’ai laissé mon coeur en Italie; Je rêve encore de vivre dans mon campeur en Colombie-Britannique; Je n’ai été réellement dépaysée qu’en Éthiopie; J’ai fait des rencontres inoubliables en Indonésie; Je n’oublierai jamais mes étés aux Îles Canaries ni mes séances de yoga en Amérique centrale, mais l’un des endroits m’ayant le plus profondément renversée reste à ce jour le désert du Sahara.
Avant de m’y rendre, c’est un tour presque complet du pays que j’ai fait en commençant par la fameuse ville de Casablanca. Je me rappelle encore très bien la chaleur accablante en descendant de l’avion. Ouf! Et moi qui n’opte jamais pour la facilité, j’ai évidemment choisi de prendre l’autobus de la ville, le tramway, mais surtout de marcher, marcher et encore marcher pour me déplacer… Je ne crois pas avoir déjà autant sué dans ma petite vie auparavant. Dans le désert, l’air est sec, alors on ne sue pas, mais à Casa, c’était une tout autre histoire. J’ai mis une éternité à me rendre au centre-ville pour me trouver un riad (auberge traditionnelle marocaine). Si au moins la chaleur était l’unique épreuve à affronter, je n’en aurais pas fait tout un plat, mais savez-vous ce qu’est un souk? Un souk, c’est un marché arabe disposé tout au long des petites avenues sinueuses de la partie ancienne des villes du Maghreb, un peu comme un labyrinthe. En y entrant, ayez conscience qu’il y a un pourcentage de chances que vous n’en sortiez jamais!... Ainsi égarée dans le souk de Casablanca, j’ai fait du porte à porte avec mon gros sac sur le dos jusqu’à trouver une chambre libre à un prix raisonnable, car oui, je ne réserve jamais à l’avance et oui, ça a ses avantages ET ses inconvénients. Dans le cas présent, ça avait l’inconvénient de me faire parcourir la médina de fond en comble, sous le soleil bouillant de l’Afrique, encombrée de toutes mes possessions pour survivre aux prochains deux mois. De l’autre côté, l’avantage était de visiter même les endroits les plus inconnus de la ville et par le fait même, de faire de bien belles découvertes.
J’ai longuement erré dans les ruelles, main dans la main avec des enfants. J’ai été initiée au thé à la menthe dans le plus petit commerce du monde, puis BOOM! En tournant un coin de rue, ne sachant ni où j’étais, ni où j’allais, je suis tombée face à face avec cet immense chef d’oeuvre: La très fameuse mosquée Hassan II. Nul besoin de vous mentionner que je n’avais encore fait aucune recherche sur mon itinéraire, ni sur les must sees du pays, alors l’effet de surprise fut non négligeable. Juste à la sortie de la vieille ville chaotique et un peu poussiéreuse se dresse ce bijoux architectural immaculé, parfaitement conçu dans ses moindres détails. Je ne m’étais encore jamais sentie petite devant autre chose que des merveilles de la nature. Cette fois, c’était une merveille urbaine et pour l’une des seules fois de ma vie, j’étais renversée par une construction de la main de l’Homme. Je suis restée là à en observer chaque centimètre, chaque morceau de porcelaine disposé pour former de gigantesques et magnifiques mosaïques. Puis, tout autour, ses palissades se jettent dans l’océan Atlantique agité où des enfants se baignaient sous l’oeil attentif de leur mère. La scène reste encore à ce jour gravée dans ma mémoire.
Comme vous devez commencer à le savoir, maintenant, les grandes villes m’épuisent, alors je n’ai pas fait long feu à Casa. Après 24h déjà, j’ai pris un train pour me rendre à la capitale: Rabat. Bon, vous me direz que de passer d’une grande ville à une autre n’est pas beaucoup mieux, et vous avez raison, mais je n’avais d’autre choix pour me rendre tranquillement à la fameuse ville bleue, dans les montagnes du nord. Et malgré ses quelques 600 000 habitants, Rabat avait un petit côté charmant. Protégée par de hautes fortifications tout autour, sa médina a définitivement une architecture plus travaillée. Puis, un peu à l’écart du village se trouve le site archéologique d’une ancienne ville romaine digne d’un film hollywoodien. Chellah abrite entre autres de nombreuses stèles et colonnes, une magnifique nécropole et une haute tour encore intacte, taillées dans de la pierre orangée, au beau milieu d’une grande vallée verdoyante, où errent quelques chats et logent des cigognes. Un réel voyage dans le temps au coeur de la capitale!
La route vers Chefchaouen fut longue et sinueuse, mais le spectacle de voir apparaître au loin le village bleu au beau milieu des montagnes du nord en valait définitivement la peine. J’aurais pu y passer des semaines à simplement errer dans les ruelles, entre les marchands et leur artisanat coloré, me réveiller au chant des prières et négocier le prix des meilleurs repas que j’ai mangé de toute ma vie. Chefchaouen fut un coup de coeur du pays, oui, mais également un coup de coeur de voyageuse aguerrie! Ses toutes petites portes colorées abritaient de véritables palaces; des auberges décorées avec une minutieuse attention et des jardins intérieurs luxuriants que même les vacanciers les plus sélectifs envieraient. La lumière reflète sur les murs bleus de son labyrinthe et met en valeur chaque volet, chaque moulure, chacun de ses angles à tout instant de la journée ou du soir faisant de cette ville un véritable paradis pour les yeux et pour l’âme.
Une fois le nord du pays atteint, il fallait maintenant redescendre pour atteindre éventuellement ses racoins les plus arides. En route vers le Sahara, j’ai fait un arrêt dans la ville impériale de Fès. Reconnue pour ses tanneries, ses poteries, ses tissages et ses mosquées, je devais absolument voir de mes yeux… et bien sûr à travers ma lentille! Au bout de plusieurs minutes de marche, guidée par un enfant se portant volontaire en échange de quelques dirhams, j’ai sillonné le souk, traversé de minuscules passages, grimpé quelques escaliers, et lorsqu’on m’a tendu une branche de menthe pour la mettre sous mon nez, j’ai su que j’étais bien arrivée. Devant mes yeux s’étendaient enfin les centaines de baignoires de céramique remplies de teintures de toutes sortes, et les innombrables peaux animales étendues au soleil. Je ne me suis pas demandé plus d’une demie-seconde à quoi me servirait bien cette branche de menthe qu’on m’avait donné à mon arrivée: En regardant autour de moi, je pouvais voir tous les locaux se promener avec un bouquet sous le nez pour ne pas avoir à subir les odeurs qui émanaient des tanneries. Ce qu’il faut savoir, c’est que le cuir animal est trempé dans l’ammoniac pour être désinfecté, puis dans la fiente de pigeons pour être assoupli, avant d’être teint. Nul besoin de vous dire que ce cocktail devient absolument insupportable, sans compter qu’il soit toxique pour l’humain. C’est sans aucun doute ce qui explique l’espérance de vie largement réduite des travailleurs des tanneries marocaines… Cette valse, sous nos yeux, n’en est toutefois pas moins magnifique.
Quelques nuits en ville et j’en avais assez. Il était enfin temps pour moi de plonger dans ce cher désert du Sahara que j'étais si impatiente de rencontrer… Je suis passée par Marrakech et après une longue nuit d’autobus, je me suis réveillée à Merzouga. Il était encore tôt et je ne me doutais pas de la puissance du soleil, alors j’ai déposé mon sac au village et je suis partie en courant vers les dunes orangées qui me semblaient si près… J’ai marché, j’ai grimpé, j’ai erré… et rapidement, midi est arrivé. J’étais assoiffée, mais entourée de sable à des kilomètres à la ronde. Heureusement pour moi, un jeune garçon s’est proposé pour me guider vers un oasis… Un vrai! Comme dans les films! En effet, entre les dunes se dressaient des centaines de dattiers et de palmiers irrigués par des canaux d’eau non potable. J’ai dû y passer une heure à m’y tremper les pieds, à me couvrir d’eau sans pouvoir en boire… Je n’avais jamais expérimenté la véritable soif avant ce moment-là, mais c’était une expérience absolument unique et mémorable. Nous sommes rentrés au village ensemble et il m’a proposé un tour de chameau au coucher du soleil et une nuit dans le désert avec les berbères: L’activité touristique par excellence dans cette ville que je n’ai pas hésité une seconde à accepter. Parfois, le tourisme a du bon. Dans ce cas-ci, ce jeune berbère allait avoir l’occasion de guider sa première excursion, sous la supervision de son grand-père, et il en était ravi. Il courait au sommet des dunes pour m’offrir les meilleures photos que je n’aurais pas pu espérer avoir de moi-même, dans un décor à couper le souffle… Plus le soleil s’approchait de la Terre et plus le sable devenait orange. Je n’avais encore jamais assisté à un spectacle aussi grandiose. C’était hallucinant… Immense… Inégalable! Nous avons surfé sur les dunes, soupé autour d’un feu de camp, chanté et dansé, et je n’étais pas au bout de l’émerveillement: Le ciel étoilé de la nuit était une scène que même les hallucinogènes les plus puissants ne pourraient reproduire. Je me rappelle d’avoir sorti mon maigre matelas à l’extérieur de la tente et avoir observé la voie lactée en espérant de toutes mes forces graver ce moment à jamais dans ma mémoire.
En quittant le paradis, il me fallait trouver un lieu à la hauteur pour ne pas retomber trop abruptement de mon nuage. Je me suis rendue sur la côte du pays; à Essaouira. Là, j’ai trouvé le juste milieu entre l’apaisement du désert et l’euphorie des souks. Chaque matin, je suis allée chercher ma petite crêpe mince au nutella, mon petit jus d’oranges frais pressé, et j’ai pu surfer librement, me balader au marché et prendre le temps de prendre le temps! On m’a souvent répété, au fil des semaines et des rencontres, là-bas: “Celui qui est pressé est déjà mort”. Une façon un peu drastique d’expliquer que si l’on ne vit pas pleinement le moment présent, on se réveillera un jour et toutes les opportunités de notre vie se retrouveront derrière nous. Je crois avoir une excellente capacité à intégrer cette notion à ma vie de tous les jours, mais le voyage me permet de le faire sans contrainte. C’est sans l’ombre d’un doute pourquoi j’y trouve une si grande satisfaction… Puisque je m’envolais quelques jours plus tard vers le continent Européen, Essaouira aura été la transition parfaite et une excellente façon de sceller mes souvenirs du Maroc à jamais!
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